Équipe PolyFinances
Revue Mensuelle – Février 2022
Finance
Les actions ont atteint un territoire de correction alors que les gouvernements annoncent des sanctions contre la Russie, par Albert Obeid
L’escalade des tensions entre la Russie et l’Ukraine a poussé les actions à la baisse mardi, ajoutant aux turbulences de cette année et laissant le S&P 500 plus de 10 % en dessous de son pic de janvier. Le S&P 500 a chuté de 1 % mardi après que plusieurs pays ont réagi à la décision du président Vladimir V. Poutine d’envoyer des troupes russes dans deux régions séparatistes de l’est de l’Ukraine. Parmi les mesures prises à l’encontre de la Russie, citons la décision de l’Allemagne d’interrompre la certification du gazoduc Nord Stream 2, qui créerait une nouvelle liaison entre le pays et la Russie, et la décision de la Grande-Bretagne d’imposer des sanctions à cinq banques et trois personnes russes.
Les actions en Europe se sont remises d’un effondrement précoce et ont terminé en légère hausse, et le S&P 500 a rebondi de son point le plus bas de la journée, où il était en baisse de près de 1,9 pour cent. Le MOEX, l’indice boursier de référence de la Russie, a gagné environ 1,6 %, inversant une baisse de plus de 9 %. Les prix du pétrole se sont également quelque peu stabilisés. Après avoir atteint près de 100 dollars le baril, le Brent, la référence internationale, s’est établi à 96,84 dollars le baril, soit une hausse de 1,5 %.
Le fait que les mesures prises par la Russie, et la réponse qui y a été apportée, soient loin de constituer une invasion à grande échelle, comme certains le craignaient, a pu calmer les nerfs, a déclaré Caroline Simmons, responsable des investissements au Royaume-Uni chez UBS Global Wealth Management. L’une des préoccupations est qu’une escalade du conflit pourrait prolonger les turbulences sur les marchés au moment même où la Réserve fédérale se prépare à réduire son soutien à l’économie dans un contexte d’inflation élevée. Les responsables de la Fed ont indiqué qu’ils se préparaient à relever les taux d’intérêt, actuellement proches de zéro, ce qui pourrait ralentir la hausse rapide des prix en décourageant les dépenses et les investissements, mais aussi la croissance économique. Une guerre entre l’Ukraine et la Russie serait susceptible de perturber les chaînes d’approvisionnement mondiales en matières premières, entraînant une hausse des coûts de l’alimentation et de l’énergie et augmentant le risque d’une période prolongée d’accélération de l’inflation. La Russie est le premier fournisseur mondial de blé et fournit à l’Europe près de 40 % de son gaz naturel et 25 % de son pétrole. Un conflit prolongé pourrait aggraver les factures énergétiques déjà élevées de l’Europe.
Figure 1 : Performance du S&P500
FinTech
Les cryptomonnaies, par Khalil Abboud
Les cryptomonnaies ont connu des hauts et des bas au courant du mois dernier. Cela étant dit, vers la fin du mois de février, plusieurs cryptos connaissent des hausses considérables, le bitcoin par exemple prend un peu moins de 7000 USD, 17.6% en deux jours (entre le 26 et le 28). L’Ethereum suit la même tendance, les deux derniers jours redresse un peu ça courbe : il connait une augmentation de 13.4%. En analysant, le S&P Cryptocurrency Broad Digital Market Index (USD), on remarque la même pente croissante vers la fin du mois, permettant à l’indice de finir positif. Comparé à cet indice, le S&P 500 fini dans le rouge : il connait une faible perte.
Figure 2 : Comparaison entre la performance du S&P Cryptocurrency Broad Digital Market Index et la performance du S&P500
Buffet & Nubank
Ayant investi 500 M$ dans Nubank, la meilleure Fintech en Amérique latine ainsi que la plus grande néo-banque indépendante au monde, en juin dernier, Warren Buffet, un des investisseurs les plus réputés mondialement, vend des parts d’actions de Visa et de Mastercard d’une valeur de 3.1 G$ pour doubler son investissement dans la fintech brésilienne (total de 1G$). On remarque ici un déplacement d’investissement du secteur financier traditionnel au secteur des Fintechs.
Industries
Par Myriem Merini
Malgré une clôture pour le mois de février sous les tensions géopolitiques grandissantes, le secteur des industries, très sensible aux fluctuations économiques, a pu limiter la casse avec une performance globale de -1.3% si l’on se fie au fond XLI (industrial Select Sector SPDR ETF). Ce dernier a tout de même surperformé l’indice de référence pour ce mois-ci puisque le S&P 500 a enregistré un rendement de -2.8%. Cette perte du cours pour le secteur industriel s’explique, par ailleurs, par une interruption des ententes de production des constructeurs automobiles comme GM en Russie, mais également du secteur de l’aviation qui a subi des perturbations avec l’interdiction de passage aérien sur le territoire russe et des fabricants comme Airbus et Boeing qui ont suspendu leurs activités dans la région.
Figure 3 : Performance en février – XLI et GSPC
Si l’on se réfère au marché canadien, on peut noter que l’indice S&P/TSX Composé pour le secteur industriel n’a connu aucune perturbation, alors que son indice de référence a subi une évolution des cours de +1.5% depuis le début du mois. On y voit donc une sous-performance du secteur au niveau national. Le rendement positif de l’indice peut s’expliquer par le fait que la crise récente a eu un impact moins notable sur le marché canadien.
Figure 4 : Indice S&P/TSX composé – Évolution des cours
On peut tout de même conclure que ce secteur s’en sort assez bien considérant sa prédisposition aux agitations de l’économie.
Consommation de base
Par Dounya Idir
Alors que le coût de la vie ne cesse d’augmenter au fil des dernières années, la situation actuelle en Europe n’a fait qu’aggraver la situation en ce qui concerne le domaine de la consommation agricole. En raison des récentes tensions entre la Russie et l’Ukraine, les produits alimentaires risquent de subir une énorme augmentation des prix, notamment dans les prochains mois, comme on peut le constater dans la figure suivante.
Figure 5 : Prévision du prix des aliments en 2022 (Météomédia, 2022)
Dans la dernière semaine, Poutine aurait mentionné que les nombreuses sanctions imposées envers la Russie et son économie ont causé la diminution de l’exportation d’engrais russe, géré par le ministère russe de l’Industrie qui a exigé l’interruption de toute expédition d’engrais. Selon le chef de l’unité des grains et du sucre de FranceAgriMer, «la Russie représente 13% du commerce mondial des produits intermédiaires nécessaires à la fabrication d’engrais et 16 % des échanges d’engrais finis » (ZRIBI, M.). Ainsi, l’ensemble des agriculteurs locaux se doivent de supporter leur économie locale en répondant aux demandes.
Figure 6 : Évolution des indices des prix à la consommation (Statistiques Canada, 2022)
L’indice de consommation, qui représente la variation des prix perçue par les consommateurs canadiens, permet d’avoir une perspective sur l’évolution du coût de la vie, dans 8 domaines tels que celui de l’alimentation et du logement. Au Canada, il est possible de constater, à l’aide de la figure précédente, que la variation sur 12 mois en pourcentage de l’indice de consommation est la plus notable entre janvier 2021 et janvier 2022.
Consommation discrétionnaire :
Par Christophe Thibodeau
Le mois de février a été un tournant pour le secteur de la consommation discrétionnaire au Canada. En effet l’indice S&P/TSX CAPPED CONSUMER DISCRETIONARY (^TTCD) regroupant les 14 titres canadiens de ce secteur est entré en phase de correction avec une chute de 12% de son sommet du 9 février dernier. Plusieurs raisons peuvent expliquer cette correction. Premièrement, les principaux indices de nos voisins du Sud sont également en repli depuis le début de l’année, ce qui engendre un sentiment pessimiste des actions non défensives, comme ceux du secteur à l’étude. En effet, plusieurs inquiétudes sont présentement reflétées dans le marché : l’inflation, les taux d’intérêt et le conflit russo-ukrainien.
L’inflation, qui diminue le pouvoir d’achat des consommateurs, n’est pas favorable au secteur de la consommation discrétionnaire, aussi connu sous le nom du secteur de la consommation de luxe. Inversement, ce phénomène a tendance à favoriser le secteur de la consommation de base (les biens essentiels). En effet, la figure 2 montre l’inflation par secteur de février 2022. Il est possible de constater que le secteur des nouveaux véhicules et celui des vêtements sont fortement en hausse, respectivement de 12,4% et de 6,6% par rapport à l’année précédente. Justement, ces secteurs occupent une grande position dans l’indice de consommation discrétionnaire au Canada (^TTCD).
La chute de l’indice s’explique également par la monté des taux d’intérêt, qui diminue le pouvoir d’emprunt des consommateurs. Ainsi, ces derniers n’auront pas la possibilité de se financer à faible taux, ce qui décourage certain acheteur de biens non essentiels, comme les véhicules. Finalement, le secteur de la consommation discrétionnaire est un secteur cyclique, donc il est normal que celui-ci ne présente pas un rendement linéaire et que malgré un début d’année difficile, il faut rester confiant en se rappelant que le marché a un biais haussier sur le long terme.
Figure 7 : Graphique quotidien du ^TSX en bleu et du ^TTCD en gris (1 an)
Figure 8 : Inflation – différence de prix par secteur entre février 2021 et février 2022
Immobilier
Par Neda Saiah
Au niveau du marché boursier canadien axé sur l’immobilier, l’indice caractéristique s’agit d’Invesco S&P/TSX REIT.
Comme il est possible de constater sur la figure ci-dessous, une belle reprise du secteur peut être noté au cours du mois de février par rapport au mois de janvier. En effet, pour le REIT, on observe une tendance stable sur la première partie du mois, puis des fluctuations haussières en fin de mois. Remarquez que l’indice, tant qu’à lui, subit une décroissance fortement marquée avec une reprise graduelle vers la fin de mois. Somme toute, le REIT surperforme l’indice pendant la seconde partie du mois et ne décroit pas aussi significativement que l’indice non plus.
Figure 9 : Comparaison entre le REIT et l’indice S&P/TSX indice composé
Cette remontée peut être en partie expliqué grâce à l’augmentation des taux directeurs en 2022 couplée à l’inflation. En effet, les REITs ont historiquement l’habitude de surperformer malgré les impacts négatifs d’une hausse des taux d’intérêt. Malgré la diminution de la valeur des propriétés (impliquant une augmentation du coût d’emprunt des REIT), une croissance économique peut également résulter en une hausse de la demande en immobilier. Ainsi, le taux d’occupation est plus élevé à loyer plus cher, ce qui résulte en une croissance des revenus, des flux de trésors et des dividendes. La figure ci-dessous démontre ce phénomène entre 2002 et 2016.
Figure 10 : Surperformance des REIT sur l’inflation
Pour février 2022, plusieurs experts suggèrent qu’il s’agit d’une bonne période pour investir dans les REIT canadiens. Voici quelques-unes de leur recommandation :
- InterRent REIT (TSX:IIP.UN)
Depuis des années, InterRent REIT a augmenté la valeur de ses actifs et les revenus générés par ses opérations en élargissant son portefeuille et en réalisant des investissements avisés pour rénover et moderniser ses bâtiments. Cela a entraîné un rendement total pour les porteurs de parts d’environ 600 % au cours de la dernière décennie ou un taux de croissance annuel composé de plus de 21 %.
- Granite REIT (TSX:GRT.UN)
Depuis l’éclosion de la pandémie mondiale, le « e-commerce » gagne nettement en popularité et les détaillants voient une plus grande partie de leurs ventes provenir des acheteurs en ligne. Ainsi, le besoin d’entrepôts pour stocker les marchandises augmente et Granite REIT a donc vu ses revenus augmenter radicalement depuis la pandémie.
Énergie
Le calme avant la tempête pour le secteur énergétique, par Louis-Frédéric Bélanger
À la suite d’une augmentation de 9% et 14% au mois de décembre et janvier, L’indice S&P/TSX Capped Energy Index (TTEN) a été plutôt stable au mois de février, du moins jusqu’au 24 du mois, date qui correspond à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Cette campagne militaire déclenchée par le président russe est considérée comme la plus importante qu’ait connue l’Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. La Russie, étant responsable de 10% et 24% de la production de pétrole et de gaz naturels au monde, à un poids important dans le secteur énergétique, surtout en Europe, où ils dépendent, respectivement, à 30% et 40% de ces ressources. Compte tenu de cela, un climat de peur s’est posé sur l’Europe dès le 24 février. Ce climat de peur concernant, entre autres, le secteur énergétique, s’est rapidement répandue jusqu’au Canada, où le TTEN a augmenté de 5% dans les 4 derniers jours du mois de février. Le prix du Brent Crude Oil a, pour sa part, clôturé le mois de février à plus de 100 dollars américains. La dernière fois que le Brent avait passé le cap du $100 était en 2014.
Matériaux de base
Par Uriel Manseau-Pérez
Un mois de février fort pour le secteur des matériaux. L’indice XMA (orange) a pleinement surpassé le TSX Index (bleu), avec une croissance de près de 14% sur l’ensemble du mois pour les matériaux alors que le TSX global termine février de manière neutre avec une croissance nulle.
Figure 11 : Courbe du prix de TSX Index (bleu) en comparaison avec la courbe de l’indice XMA (orange)
Le secteur des matériaux est très sensible aux fluctuations de l’économie mondiale et aux sensibilités inflationnistes. Au courant du mois, une communication majeure a été publiée sur la situation de l’inflation aux États-Unis. Ce sont ces chiffres qui déterminent les actions de la Fed américaine et qui, à leur tour, feront bouger les marchés boursiers et obligataires. D’après le rapport, l’inflation est en forte hausse, atteignant 7,5 % sur une base annuelle, soit encore plus que prévu. Il s’agit également du taux le plus élevé depuis 1982. Ces pressions inflationnistes expliquent en partie la sur-performance du secteur. En effet, puisque le secteur des matériaux est composé de plusieurs actifs aurifères, ce dernier a tendance à bien performer en temps l’inflation est en hausse.
Cela dit, avec la guerre entre la Russie et l’Ukraine, les prix élevés de l’énergie constituent un frein à la rentabilité de la production chimique, dépendante de produits fossiles comme matériaux de base. Si le mois de février a terminé en hausse pour le secteur, il est peu probable que la croissance se maintienne au courant du prochain mois alors que les politiques financières accommodantes qui ont soutenu la croissance économique mondiale sont en train de s’inverser.
Technologie de l’information
Par Olivier Kénol
Depuis le mois de février, bien que l’indice de référence de la bourse de Toronto ait vu sa valeur demeurer stable, le secteur technologique quant à lui a subi une correction ; la valeur de l’indice du XIT (ETF suivant l’évolution des titres technologiques de la bourse de Toronto) a baissé d’environ 13% durant le dernier mois.
Cette baisse est due à l’instabilité économique causée par la montée rapide de l’inflation à travers le globe alors que divers pays commencent à supprimer les mesures mise en place pour combattre la COVID-19. La relance économique est donc accompagnée d’un risque d’augmentation des taux d’intérêt, ce qui dissuade les investisseurs d’allouer du capital dans les secteurs plus volatils puisqu’ils sont plus risqués.
Une partie de la baisse de la valeur du XIT peut s’expliquer par le déclin de Shopify ; après l’annonce de l’entreprise déclarant que la croissance de son chiffre d’affaires ralentirait suite au retour la vie normale, le titre n’a pas cessé de perdre de la valeur. Par rapport au mois dernier, l’action de Shopify a un rendement négatif de 42% alors qu’elle représente près de 23% de la valeur du XIT.
D’autres exemples de grandes entreprises technologiques ayant eu des rendements négatifs au cours du dernier mois sont Constellation Software (-3.70%), CGI (-4.73%), Open Text Corporation (-6.97%) et Nuvei Corp (-16.94%) représentant respectivement 25.82%, 15.38%, 10.09% et 3.17% de la valeur du XIT.
Figure 12 : Comparaison entre iShares S&P/TSX Capped Utilities Index et S&P/TSX
Utilités
Par Marc-Hubert Acajou-Bathelmy
Le mois de février a été bon mois pour les investisseurs du secteur des utilités. En effet, le FNB iShares S&P/TSX Capped Utilities Index (XUT.TO) à surperformer l’index S&P/TSX en offrant un rendement positif de 1,29% comparativement à l’indice qui a offert un rendement négatif de 1,48%. Depuis l’année dernière, le secteur des utilités a offert un rendement positif de 8,87% à ses investisseurs. Cela représente une différence de 4,48% avec l’indice S&P/TSX qui a offert un rendement positif annuel de 13,25%.
Figure 13 : Rendement de février 2021-2022 : XUT.TO et S&P/TSX
Bien que l’instabilité au niveau des marchés financiers ait atteint de nouveaux sommets au cours du mois de février dû à de nombreux facteurs dont notamment l’inflation et la guerre en Ukraine, le secteur d’utilités canadien affiche tout de même un rendement annuel positif de 1,51% comparer au S&P 500 et le S&P/TSX qui ont respectivement offert des rendements de -12,35% et 1,06%. Ce n’est pas surprenant que le secteur arrive à donner des rendements acceptables même durant ces temps mouvementés, puisque lorsque l’environnement économique et financier mondial devient plus mouvementé et incertain, les investisseurs ont tendance à vouloir protéger leurs portefeuilles en s’orientant vers des actifs plus défensifs.
Références
https://www.nytimes.com/live/2022/02/22/business/stock-market-economy-news
https://www.bnc.ca/content/dam/bnc/fr/taux-et-analyses/analyse-economique/mensuel-boursier.pdf